Robert Kopp

Écrivain, éditeur, professeur émérite de littérature française de l’Université de Bâle

Cent ans après, sommes-nous tous devenus surréalistes?

Lancé à la rentrée de 1924 par André Breton et ses amis, le Surréalisme, petit mouvement d’avant-garde parmi d’autres, a rapidement fait la conquête de la planète tout entière. Faire une place au rêve et à l’inconscient, réinstaller l’art dans nos existences quotidiennes, rompre radicalement avec une civilisation qui s’est discréditée dans le naufrage de la Première Guerre mondiale, bref: changer le monde et transformer la vie, ce message a été entendu par tous ceux qui étaient à la recherche de nouvelles formes artistiques, d’expressions poétiques inédites, de manières d’êtres défiant les normes transmises. Or, ce qui se voulait une révolution est devenu une habitude. Tout le monde se veut désormais disruptif. La protestation qui a commencé dans la rue a fini au musée. Le défi lancé aux institutions s’est institutionnalisé. Cela s’appelle une récupération. Que reste-t-il alors de ce vent de poésie et de liberté qui a animé les fondateurs?